UNE VIE DE FEMME - 26 ème partie
La convocation du juge est arrivée, le rendez-vous est prévu dans son cabinet le 12 décembre 1984.
Quelques jours avant cette date j’arrive à Paris, je descends chez Linda, je profite de mon passage pour aller voir ma mère chez elle ; au téléphone, elle m’a paru bizarre comme si elle ne voulait pas me voir puis finalement accepte que je vienne…. Pour le café.
La j’ai la surprise de trouver mon père ; mes parents se voient de temps en temps depuis qu’Yvonne est partie de la maison, ce dernier vient de subir une très grande opération, il me montre sa poitrine qui est parcourue, de l’épaule droite à la hanche gauche d’une cicatrice encore fraiche. Je ne saurai jamais ce qu’il a exactement car le mot « cancer » est banni de son vocabulaire mais c’est la dernière fois que je le verrai.
Les deux heureus passées chez ma mère sont d’une tristesse sans fin, elle ne parle pas, sa petite bouche pincée comme elle le fait si souvent. Dans deux jours je saurai pourquoi. Le café avalé je repars chez Linda. Je ne reverrai jamais ma mère.
Le lendemain je prends le train. Quand j’arrive dans la ville des corsaires, La maman de l‘amie d’Alex que nous appellerons Claire est venue me chercher à la gare et m’emmène directement chez elle où le déjeuner m’attend. Elle a prévenu mon fils que je serai chez elle et il viendra s’il peut s’échapper de la maison sans donner l’éveil.(en effet, je le verrai quelques minutes le visage défait, les larmes aux yeux). Puis elle me conduit à mon hôtel et nous nous quittons mais je l’invite le lendemain soir avec sa fille dans une créperie puisqu’ensuite je retourne à Paris.
De là j’ai rendez-vous avec mon avocat que je ne connais pas. Là, nous discutons de la marche à suivre et il m’explique comment les choses se passeront chez le juge. Il est très confiant car mon dossier est bon et solide.
De retour à l’hôtel, j’ai rendez–vous dans la soirée avec David que je suis arrivée à joindre. Lorsqu’il arrive dans ma chambre, je suis devant un homme de grande taille, bien habillé ; nous sommes gauches tous les deux ne sachant pas trop de quoi parler et puis la conversation démarre et il me fait part de ses projets et je dois dire que je ne comprends pas grand chose à ce qu’il me raconte, il passe d’un projet d’élevage de lapins à celui de passer des mercédes en fraude en direction du Liban et me dit-il « comme ça je pourrai venir te voir » !!!. Je crois qu’il ne réalise pas qu’il s’agit d’un trafic de voitures volées, à mon avis il divague complètement et je lui dis alors que je préfère les lapins car c’est plus sûr ce à quoi il me répond : « peut-être mais c’est moins bien payé ». !!! On se quitte sans savoir de quoi au juste on a parlé, moi je suis vidée et je sais que le lendemain une dure journée m’attend.
Arrivée dans le palais de justice, nous attendons devant la porte du juge, Guy, son avocat, le mien et moi. La porte s’ouvre. Une fois assis, les avocats remettent chacun leur dossier que le juge, homme jeune et impassible consulte.La lecture terminée il nous dit alors les phrases traditionnelles en pareil cas puis reprend le dossier de Guy et sort trois lettres qu’il lit à haute voix : la première vient d’un voisin qui explique qu’il voit Alexandre chaque jour, qu’il lui fait l’impression d’un enfant bien élevé et bien dans sa peau. Le deuxième vient d’une couple connu en Afrique et qui passe ses vacances chaque année dans la ville de Guy et Nelly et qu’ils constatent les changements, en bien, survenus d’année et année. La troisième, c’est la cerise sur le gâteau une lettre de ma mère qui écrit ceci :
« Mon cher Guy,
Je suis bouleversée par ce que vous m ‘écrivez . C’est vrai, ma fille a toujours été une enfant difficile et une femme à la vie tulmultueuse mais ce qui m’a fait le plus de peine, c’est lorsqu’elle a abandonné ses enfants pour partir en Israël. Merci mon petit Guy de ce que vous faites pour les enfants en leur donnant une éducation qu’ils n’ont jamais eue. »
La tête du juge est inexpressive mais par contre celle de mon avocat et la mienne ont changé de couleur. J’ai toujours su que ma mère ne m’aimait pas, qu’elle m’en voulait d’avoir choisi justement Israël, le peuple qui a tué son Jésus, et c’est sa réponse.
Le juge met fin à ce mini suspens et nous disant que de toute façon il ne veut pas prendre de décision avant la fin de l’année scolaire en juin soit dans 6 mois et qu’alors il nous fera part de sa décision
Dehors et profitant de la présence de mon avocat à mes côtés je demande au père l’autorisation d’emmener avec moi Alex au restaurant le soir même puisque je repars le lendemain et pour faire bonne figure, il accepte, surtout que le lendemain, il épouse Nelly !!!!! la veille il a dû enterrer sa vie de garçon car il pue l’alcool à plein nez.
Cette soirée qui aurait dû être gaie est d’une tristesse à mourir, Alex ne mange rien et retient ses larmes comme il le peut. Nous mettons alors une stratégie en place pour que tout changement ou toute chose importante transite par claire, par lettre, par téléphone peu importe mais surtout que les nouvelles circulent entre nous pour qu’il n’y ait pas de mauvaises surprises. L’avocat est également prévenu et a les coordonnées de claire.
Le lendemain je rentre chez Linda à qui je raconte ce qui s’est passé. Pour ma mère, j’ai décidé de ne plus lui donner signe de vie jusqu’à la décision du juge car elle est devenue à mes yeux trop dangereuse et pourrai répéter à Guy tout ce qui pourrait me nuire et surtout nuire au désir d’Alexandre qui lui, ne lui a rien fait pour mériter une telle conduite de sa part.
Par contre, une fois revenue de mon périple, j’ai appelé mon père, sachant qu’il voyait ma mère, pour lui raconté ce que j’avais découvert et que c’était la raison pour laquelle elle n’entendrait plus parler de moi jusqu’à l’issue du procès. Et j’ai entendu la chose suivante : « moi aussi Guy m’a demandé de faire une lettre, mais je suis trop malade et je n’en ai pas eu la force ». (Merci cancer).
Quand je rentre à Tel-Aviv je raconte bien sûr mes aventures et pour me sortir un peu de ma tristesse, Iori m’emmène une fois de plus danser. Qu’y-a-t-il d’autre à faire ?
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